Le maintien, père de l’équilibre et de la détente

Cet article présente une position adaptée au chant lyrique. Il passe en revue 5 zones du corps et présente pour chacun une position qui favorise l’équilibre, permet la détente générale et libère la tonicité des muscles impliqués dans le chant.

1) Positionner le centre de gravité du corps au centre des voûtes plantaires

Les pieds sont légèrement écartés de sorte de se trouver sous l’articulation de leur hanche.

On cherche à positionner le centre de gravité au-dessus du centre des voûtes plantaires, de sorte de :

  • Favoriser l’équilibre
  • Minimiser les efforts musculaires à accomplir pour maintenir la posture

Pour ce faire, vous pouvez :

  • Vous mettre debout et fermer les yeux
  • En focalisant votre attention sur les sensations de vos plantes de pieds, déplacer votre corps lentement, à gauche, puis à droite, puis en revenant à la position médiane d’équilibre
  • Puis déplacer votre corps en avant, en arrière, et revenir lorsque vous sentez que le poids du corps est centré sur vos voûtes plantaires

La recherche de ce centre de gravité focalise notre concentration sur nos sensations intérieures, ce qui :

  • Réduit la nervosité venant de journées de travail sollicitant grandement notre réactivité
  • Développe nos perceptions kinesthésiques (perception de la position et du mouvement)
  • Favorise la canalisation de notre énergie dans des mouvements utiles à l’émission vocale

2) Déverrouiller les genoux et donner au bassin une orientation médiane

Une position des genoux verrouillée en arrière tend à :

  • Cambrer le bassin, ce qui réduit la marge de manoeuvre des abdominaux, muscles expirateurs très employés en chant lyriques
  • Raidir la posture, ce qui ne facilite pas l’équilibre et la stabilité

Les genoux seront donc déverrouillés, c’est-à-dire à environ 5 cm devant la position de verrouillage en arrière.

En conséquence, la jambe est légèrement inclinée vers l’avant, et la cuisse est verticale, à la verticale de la voûte plantaire.

Le bassin est dans une position intermédiaire entre l’antéversion (cambrure) et la rétroversion, laissant aux muscles posturaux (dorsaux, abdominaux) une souplesse de fonctionnement (ch. schéma ci-contre1).

3) Positionner le torse de façon verticale et allonger la colonne vertébrale

Un torse non vertical perturbe l’équilibre du corps et mobilise inutilement des muscles posturaux, ce qui risque de raidir les muscles respiratoires proches.

En outre, une colonne vertébrale penchant vers l’arrière limite l’amplitude de la respiration. Vous pouvez en faire l’expérience :

  • En inspirant dans une position normale, puis…
  • En inspirant dans une position penchée vers l’arrière

Vous pouvez affiner cette verticalité en espaçant verticalement les vertèbres (la marge de manoeuvre est limitée, de l’ordre du millimètre, mais pas nulle). Pour ce faire, balayez de votre attention votre colonne vertébrale de bas en haut : lombaires, dorsales, cervicales.

Cette verticalisation doit se faire en souplesse : l’objectif est d’assurer un équilibre et une ouverture de la zone respiratoire ; il convient d’éviter toute crispation.

4) Détendre le cou ; détendre les épaules et les ouvrir dans le sens latéral

Le thorax est lié à la tête par de nombreux muscles (cf. schéma ci-contre2) :

  • Sterno-cléio-occipito-mastoïdien (SCOM)
  • Scalènes (attachées aux cervicales et tirant les deux premières côtes vers le haut)

Bien utilisés, ces muscles peuvent contribuer à l’inspiration ; cela dit, cette contribution est minime et risque de crisper par voisinage les muscles du larynx.

Vous pouvez en faire l’expérience :

  • Enveloppez l’avant de votre cou avec votre main
  • Inspirez en élevant votre cage thoracique
  • Sentez avec votre main la crispation de certains muscles du cou

On préfèrera inspirer latéralement plutôt que verticalement.

Par ailleurs, les épaules seront positionnées de façon dite « ouverte », au sens où elles pointent vers les côtés du corps. Cette position offre 2 avantages :

  • Elle est esthétique
  • Elle favorise l’amplitude respiratoire en tirant vers le côté le petit pectoral (cf. illustration ci-dessous3), muscle reliant l’omoplate à 3 côtes et qui les ouvre en anse de seau 3 des côtes situées sous les clavicules

Petits pectoraux

Si vos épaules sont spontanément voûtées vers l’avant, vous pourrez redonner de la mobilité à l’épaule et au petit pectoral en étirant vos bras vers le haut.

Point d’attention : évitez de tirer les épaules à l’arrière et de bomber excessivement le torse ; une telle position sollicite beaucoup les muscles et peut donner l’air hautain.

Les épaules sont liées à la tête par le trapèze. Ce muscle puissant tend à désorganiser la posture en rapprochant les épaules et en télescopant le cou. On préfèrera détendre le trapèze et laisser d’autres muscles posturaux du cou assurer son maintien. C’est ce que font spontanément de nombreux choeurs qui pratiquent le massage réciproque en cercle.

5) Positionner la tête à l’équilibre au sommet de la colonne vertébrale

La tête doit reposer à l’équilibre au sommet de la colonne vertébrale, ce qui permet notamment de limiter la sollicitation des muscles posturaux du cou, et donc de favoriser la liberté de mouvement du larynx.

Pour ce faire, vous pouvez :

  • Fermer les yeux
  • Réaliser des mouvements de la tête lents et de faible amplitude, de gauche à droite, en portant votre attention sur le niveau de tonicité des muscles du cou et en repérant le moment où la tête est dans sa position la plus équilibrée
  • Puis répéter avec un mouvement selon l’axe avant-arrière

La position de la tête doit également favoriser l’élargissement du conduit pharyngé, « tuyau » situé immédiatement au-dessus du larynx et premier résonateur de la voix. Un positionnement de la tête trop en arrière de la tête tend à compresser le pharynx ; la voix perd alors en richesse harmonique.

« Maintien » plutôt que « posture » : vers un équilibre tonique plutôt qu’une posture hiératique

Les éléments de maintien exposés précédemment visent à favoriser :

  • L’équilibre
  • La détente, préalable à la tonicité des muscles à solliciter pour le chant (XXX lien vers autre article)
  • La concentration et la baisse de la nervosité

Le terme de « posture », souvent utilisé, et les 5 éléments de maintien que je cite, peuvent tendre à rigidifier le corps d’un.e chanteur.se débutant.e, à monopoliser sa concentration et à aboutir à une position raide, hiératique et peu naturelle. Il convient de comprendre l’intérêt de ces 5 éléments, et d’y porter attention de temps en temps, par exemple en tout début de répétition ou de travail technique, pour que le corps les intègre et se meuve ensuite en liberté sans nuire à l’émission vocale.

On fera simplement attention à éviter les syncinésies, ces mouvements qui accompagnent le chant en croyant y contribuer mais qui ne contribuent pas, voire gênent :

  • Monter la tête en allant vers l’aigu
  • Accompagner une vocalise d’un geste en pensant la faciliter…

Les syncinésies sont fréquentes dans les pièces sollicitantes (changements de nuances dynamiques, tessiture large, pièces très engageantes…) ou en présence d’un chef de choeur très démonstratif.

Cela dit, on pourra laisser cours aux mouvements interprétatifs spontanés.

Le maintien, reflet de notre bien-être

Notre maintien reflète notre bien-être et le fait que nous nous sentons confiant.e.s et à notre place. Il invite également votre public à se sentir heureux et à son aise, aussi je vous encourage à lui faire ce cadeau !

1 L’excellent ouvrage « La voix, un art et un métier » de Cécile Fournier contient un schéma présentant une position favorable au chant. L’ouvrage étant à ma connaissance épuisé, je me permets de reproduire ledit schéma, en remerciant Mme. Fournier pour son travail clair et de qualité.

2 Source : By Berichard GFDL or CC BY-SA 3.0, via Wikimedia Commons

3 Source : « BodyParts3D, © The Database Center for Life Science licensed under CC Attribution-Share Alike 2.1 Japan. »

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